Soldats, je suis content de vous ! (PV Adriana)

Eugénie Angélique Florence Louise Marie de Montvermeil ~~mais je vous en prie, appelez-moi Majesté~~ n'était pas d'humeur badine en cette froide fin d'après-midi. Pomona Chourave qui, sous ses airs de grand-mère douce et aimante dissimulait avec art une vraie perversité - la fourbe ! - avait chargé ses élèves de troisième année, en début de semaine, de collecter et de classer avec amour, dans un grand herbier, toute une liste de plantes en apparence fort communes mais qui recelaient "des propriétés absolument fabuleuses, mes chers petits !" Inutile de préciser que les chers petits en question n'avaient pas été emballés à l'idée de gambader dans un parc gelé dans le seul but de récolter deux ou trois mauvaises herbes. Franchement, ce n'était pas le boulot du garde-chasse, de désherber les jardins de l'école ? Car oui ! Eugénie en était convaincue, cette opération "découverte de la flore locale" (et accessoirement de la faune. Merlin seul savait quelles affreuses bestioles pouvaient bien gîter dans le parc ! On parlait bien d'un calmar géant dans le lac !) n'était qu'un prétexte pour qu'une main d'oeuvre pas payée du tout (sinon en cloques, ampoules et gros rhumes) ôte le chiendent qui poussait à tort et à travers dans la pelouse malmenée par l'hiver.

Mais il y avait pire. Oui ! Pire que la perspective de passer de longues heures courbé en deux, le nez dans la boue et les os glacés par la bise hivernale. Il y avait les équipes. Le professeur Chourave, dans un élan d'enthousiasme poufsouffléen fort malvenu leur avait en effet annoncé, les joues roses d'excitation que, pour alléger le travail ("Mes pauvres chéris, je sais que c'est dur pour vous, mais croyez-moi, tous ces devoirs sont nécessaires et un jour vous nous remercierez !"), elle avait décidé d'attribuer un herbier pour deux élèves... Et qu'elle avait déjà constitué les duos. A ce moment là de l'histoire, toute la classe avait senti ses genoux trembler. Toute la classe ? Non ! Une petit Serpentarde résistait encore et toujours à l'envahisseur tremblote ! Eugénie était une De Montvermeil et, en tant que telle, elle se devait de tenir son rang. L'aristocrate ne tremble pas. Il avance dignement vers l'échafaud. Aussi était-ce dignement que la fillette avait entendu Pomona lui annoncer qu'elle ferait équipe avec Adriana-quelque-chose (comme si Eugénie avait pris la peine de retenir son nom ! Peuh !). Une Poufsouffle ? Bien. De toute façon, ça ne pouvait pas être pire que de se retrouver avec un Serpentard. D'ailleurs, Athénaïs elle-même était à Poufsouffle (mais il s'agissait là probablement d'une erreur de choixpeau). Contrairement à la plupart de ses camarades, Eugénie n'avait pas - ou très peu - d'a priori sur les autres maisons. Probablement parce qu'elle était née moldue. Probablement aussi parce que, à ses yeux, seule la noblesse comptait. Or, la noblesse pouvait se retrouver aussi bien à Poufsouffle qu'à Serpentard. Ce n'était pas pour autant une preuve d'ouverture d'esprit, loin s'en fallait ! En réalité, cette certitude avait radicalement isolé Eugénie au sein de sa propre maison. Mais au moins Adriana pouvait être assurée qu'elle n'était pas tombée avec la plus vipère des Serpentards.

Tout ceci s'était déroulé plus de trois jours auparavant et il était grand temps de commencer à constituer l'herbier. Aussi Eugénie avait-elle envoyé, ce matin-là, un hibou à Adriana pour lui suggérer de la retrouver dans le parc, après le dernier cours de la journée, afin de profiter des dernières lueurs du jour. Qui sait ? Avec un peu de chance, peut-être trouveraient-elles un certain nombre des plantes que la (longue) liste de Chourave leur indiquait ?
Elle-même était sortie dans le parc aussitôt après la classe de potions, soigneusement emmitoufflée dans sa cape, une grosse écharpe rose enroulée autour du cou et un bonnet orné d'un gros pompom du même rose criard enfoncé jusqu'aux yeux. Quant à ses gants... Hé bien ses gants étaient roses, eux aussi, et ornés des deux gros Bisounours souriants qui levaient une papatte en un salut un peu fou. Le besace de cours d'Eugénie elle-même était ornée du même Bisounours à la puissance dix. C'était cette image qui lui avait valu tant de déboires avec Ethan. Espérons qu'Adriana serait se montrer plus compréhensif. Oh Merlin ! Si sa se trouve, son binôme aimait les Bisounours !
Toute émoustillée à cette idée, Eugénie entreprit de lorgner d'un oeil apparemment désinvolte les alentours, attendant avec impatience l'arrivée de sa camarade...

Adriana était sur le point d’aller faire ses devoirs lorsqu’un hibou arriva devant elle. Curieuse, elle se demandait bien qui pouvait lui écrire. Ce ne pouvait tout de même pas être Éva, elle n’avait même pas écrit à la vieille sorcière (elle se rappela donc qu’elle devait aussi le faire bientôt). Elle détacha le parchemin du hibou et s’est alors qu’elle comprit d’où venait ce message.

FLASHBACK

Nous remontons 3 jours plus tôt. C’était un après-midi froid, mais Adriana devait quand même se rendre dans les serres avec les autres 3ème années pour son cours de botanique. Elle était bien emitouflée dans une grosse cape, en n’oubliant surtout pas son foulard et ses gants pour se protéger du vent qui lui mordait la peau. La jeune Poufsouffle arriva dans les serres un peu avant que le cours commence et attendit sagement en silence.

Elle fit le tour de la pièce du regard et remarqua qu’elle ne connaissait personne. Il faut dire qu’elle ne parlait pas à beaucoup de gens et qu’elle ne remarquait pas vraiment ceux qui l’entouraient d’habitude, mais bon. Le professeur arriva ensuite et donna son cours très normalement. Comme à l’habitude, Adriana restait la plus discrète possible.

À la fin du cours, elle s’attendait à avoir un petit devoir, mais le professeur Chourave leur avait préparé une petite ‘’surprise’’. Ils devait cueillir certaines plantes qu’elle avait listées et les conserver dans un herbier. Cette idée n’enchantait pas Adriana avec toute la neige et le froid qu’il faisait dehors, mais ce qu’elle ne savait pas, c’est que le pire restait à venir. En effet, elle entendit que les travaux se feraient en équipe, et qu’en plus, c’était elle-même qui avait formé les pairs.

RETOUR

La jeune fille, qui avait redouté ce moment depuis l’annonce du professeur, du se résigner à voir la réalité en face. Elle déplia le parchemin qui l’invitait à aller la rejoindre dans le parc. L’écriture était très soignée et les mots bien choisis.

* Au moins je suis avec une fille. *

Étant déjà un peu plus motivée, Adriana mis sa grosse cape et tout ce qui vient avec pour affronter le froid avant de sortir dans le parc. Elle ne savait pas exactement où serait sa coéquipière, mais quand elle remarqua quelqu’un qui portait beaucoup de rose et qui avait l’air seule, elle se dit que c’était sûrement elle.

La Poufsouffle avança lentement vers elle. Heureusement, elle s’était souvenue du nom de la jeune fille avec qui elle devait travailler.

- Euhh.. bonjour. Excuse-moi de te déranger, est-ce que c’est toi Eugénie?

*Non, non, moi c'est Sissi, impératrice assassinée de mon état, mais chuuuut, je suis ici incognito !* songea aussitôt la petite De Montvermeil, lorsqu'une blondinette à l'air légèrement perdu vint l'aborder.

C'est ce qu'elle aurait pu répondre. Ou bien encore "Que la paix du Grand Bisounours soit avec toi, ma soeur !" (une entrée en matière qui, avait-elle remarqué, produisait toujours son petit effet). Mais il lui vint à l'esprit que commencer ainsi ce qui risquait d'être une relation scolaire à long terme (au moins une séance de recherches florales dans le parc, attention !) n'était peut-être pas une idée très brillante. Aussi Eugénie préféra-t-elle se fendre d'un large sourire de Bisounours - après tout, Adriana était une Poufsouffle, et tout le monde savait que les Poufsouffles agissaient étrangement (déjà ils semblaient vouer un culte aux "Euh" et autres interjections gênées inconnues d'Eugénie) - et répondre d'une voix flûtée, tout en gratifiant sa camarade d'un coup d'oeil perçant :

- Tout à fait, je suis Eugénie Angélique Florence Louise Marie De Montvermeil... Mais tu peux m'appeler Eugénie, daigna-t-elle rajouter gracieusement.

Comme si Adriana ne s'était pas déjà octroyé ce privilège !
La fillette redressa un peu son bonnet pour mieux considérer son binôme (*Moui, elle n'a pas l'air totalement incapable... Nous devrions pouvoir nous en sortir !*). Quelles que fussent les conclusions de cette rapide analyse, Eugénie préféra les garder par devers elle et entrer directement dans le vif du sujet. Après tout, plus vite elles auraient récolté les herbes et plus vite elles pourraient rentrer se mettre au chaud... Enfin, à supposer que la salle commune des Blaireaux soit chauffée, bien entendu ! Sans compter qu'Eugénie n'avait pas l'intention d'arriver en retard au dîner !

- Bien, déclara-t-elle donc d'un ton de général en chef qui organise une campagne particulièrement compliquée, j'ai sur moi la liste des plantes à récupérer. Pour la plupart, elles sont vraiment communes mais deux ou trois risquent de nous poser problème. L'agapanthe, par exemple. Elle est censée pousser dans un milieu chaud et humide. Franchement, on ne peut pas dire que Poudlard soit propice à ce type de fleurs... Humide, d'accord, mais chaud... Enfin passons... Je propose de commencer par le plus simple : le perce-neige. En cette saison, ils doivent être légion et ils sont normalement assez facilement repérable... Tu es d'accord ? Tu as pris ton matériel de botanique ? Sinon j'ai le mien...

La jeune fille se tut alors un instant (ne serait-ce que parce qu'elle avait bien besoin de reprendre son souffle !) et adressa un regard en biais à Adriana. Elle espérait bien ne pas être tombée sur une greluche lambda craignant pour son précieux vernis à ongles et refusant catégoriquement de se baisser pour chercher des petites plantes potentiellement (et même, en cette saison, sûrement) pleines de terre.
Pour sa part, Eugénie ne craignait pas de se salir. D'une part parce qu'elle avait été mise, dans sa folle jeunesse, chez les Jeannettes, ce qui forge le caractère et oblige assez rapidement à comprendre que la nature n'est pas votre ennemie, ensuite parce que deux siècles de présence De Montvermeil sur le sol anglais avaient libéré la famille de ses vieux préjugés français sur le rôle de l'aristocratie aussi ne semblait-il désormais plus aussi avilissant qu'autrefois à un De Montvermeil de travailler. D'ailleurs, en Angleterre, tout Lord digne de ce nom se devait d'arpenter ses terres d'un air conquérant de propriétaire comblé. De préférence avec un ou deux chiens de chasse sur les talons. Malheureusement pour Eugénie, elle n'avait pas de chien de chasse sous la main ~~mais peut-être qu'un elfe de maison pourrait tenir le rôle ?~~, toutefois, ce n'était pas nécessairement un mal. Après tout, chien et petites fleurs n'allaient pas vraiment ensemble. Sauf si on aimait les petites fleurs écrabouillées, bien entendu.

Adriana était en effet tombée sur la bonne personne, mais elle fut un peu surprise. Eugénie, qui s’appelait en fait Eugénie Angélique Florence Louise Marie, semblait très différente d’elle. Comme elles allaient passer quelque temps ensemble, du moins le temps de faire ce fichu travail dans le froid, Adriana se dit qu’elle devrait s’en accommoder, même si elle avait l’impression que ce serait plutôt difficile.

La jeune fille de Serpentard était habillée de rose, ce qui fit croire à Adriana qu’elle serait obligée de faire tout le travail toute seule, mais elle n’avait pas l’intention de faire cela. Si Eugénie était le genre de fille qui avait peur de se salir, Adriana allait faire ce travail toute seule! Après tout, elle avec sa liste elle aussi et son matériel.

Adriana l’analysait encore minimalement lorsqu’elle remarqua que la jeune fille parlait et qu’elle avait manqué le début de son petit discours. La seule chose qu’elle entendit fut ‘’Tu es d'accord ? Tu as pris ton matériel de botanique ? Sinon j'ai le mien...’’ Ne sachant pas du tout sur quoi elle devait être d’accord, Adriana se contenta d’hocher la tête vigoureusement.

Elle sortit ensuite son matériel de botanique et sa liste de plantes.

*Bon… je me demande ce qu’on cherche…*

Adriana commença à faire quelques pas, en essayant de voir ce qu’Eugénie cherchait pour s’orienter, mais rien n’y faisait, elle ne savait pas du tout ce qu’elle devait faire. Elle prit donc son courage à deux mains et s’adressa à sa partenaire.

- Excuse moi encore euh… tu sais tantôt, quand tu parlais des plantes, tu as dit qu’on commençait par chercher laquelle?

Elle se sentait un peu mal de poser cette question et avait peur d’offusquée la petite demoiselle, mais elle ne voulait pas non plus la faire travailler toute seule quand c’était un travail en équipe.

» [Poufsouffle] Adriana Jayden
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